ゴンクール兄弟とその時代I
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概要
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≪Pas jolis jolis, ces deux cocos, Jules et Edmond de Goncourt.≫ dit une revue franchise. Pourquoi cette raillerie? Parce qu'ils furent ecrivains rates? Parce qu'ils creerent une Academic pour arracher a la posterite la gloire et l'immortalite de leur nom, que leur epoque leur avait refusees? Parce qu'ils furent d'affreux retrogrades, aussi misogynes que racistes? Mais qui sont-ils, enfin? ≪Goncours?≫, repondra une parisienne, ≪Une station de metro, direction Mairie-des-Lilas?≫ ≪Oui, oui, je connais≫, acquiescera l'aimable homme de la rue. ≪Un prix litteraire, non?≫ Quelle amertume pour les freres! Us en pleureraient a mourir. Bon, les Goncourt furent deux auteurs mediocrement estimes, a peine lus et furieux du peu de cas que l'on faisait d'eux. Malgre tout, malgre toutes les surcharges et affeteries que comporte l'ecriture ≪artiste≫ dont Jules est l'inventeur, leurs oeuvres peuvent bien etre lues maintenant et leur style meme etre aime. Si l'on juge leur Journal anecdotique et superficiciel, c'est souvent sans l'avoir lu. Mais ce ≪Journal≫ qui court de 1851 a 1896 est un chef-d'oeuvre, auquel la forme emiettee, l'accumulation d'episodes dont le hasard dicte le sujet, le style ≪reporteur d'images≫, les defauts, enfin, conferent une extraordinaire expressivite. La lecture en est indispensable a qui veut analyser l'etonnant esprit d'une fin de siecle dont la stupidite fut sans precedent. Et sur ce plan-la, ces braves ≪bichons≫ parisiens sont les plus forts: charges visceralement de toute la betise de leur temps, ils furent vraiment deux parfaits vieux bourgeois, misogynes, antisemites, preferant l'injustice au desordre. Mais soyez gentils avec ces deux infortunes! Eux qui travaillaient avec tant de perseverance et menaient une vie si maussade, n'etaient-ils pas respectes de leur bonne? Ces maitres du parisianisme meritent maintenant d'etre consideres comme d'excellents representants des gentilhommes francais de leur temps. Hommes de lettres ne frequetant guere que leurs semblables, ils rencontrerent cependant toute une constellation d'hommes et de femmes qui se firent remarquer pendant la deuxieme moitie du XIX^e siecle. Des nombreux aspects du Second-Empire que revele leur journal, je ne retiendrai ici qu'une partie. Le premier chapitre, a travers les citations de notes anciennes retrouvees, dues a Jules de Goncourt, nous permettra d'evoquer la manifestation ouvriere du 15 mai 1848. Dans le chapitre suivant, nous decouvrirons les rues de Paris dans l'atmosphe're creee par le Coup d'Etat de Louis-Napoleon Bonaparte (1851). Apres avoir assiste a l'echec du premier roman des Goncourt et a la fondation d'une revue par leur cousin, nous serons entraines au fil des peripeties d'un proces intente contre cette revue, -ou les freres avaient insere certain poeme erotique. Tel etait du moins le pretexte de la poursuite, engagee peut-etre par suite d'une vengeance d'actrice. Ayant divulgue, dans un article, le conflit ou s'opposaient deux comediennes fameuses, dont l'une etait la maitresse du Prince Napoleon, ils ne pourront jamis oublier la peur que leur avait causee leur condamnation pour outrage a la morale publique et renongeront pour toujours au journalisme. Le troisieme chapitre contiendra des portraits brosses au moyen d'anecdotes relevees dans le Journal, notamment celui du couple imperial. Les Goncourt etaient devenus des habitues du salon de la Princesse Mathilde, laquelle, a propos de l'imperatrice Eugenie, n'etait pas avare de petites phrases. Nous saurons aussi comment l'empereur se conciliait les hommes de lettres ou ≪achetait les savants≫. Au quatrieme chapitre, voila le salon de la Princesse Mathilde, haut lieu, pour ainsi dire, des machination politico-culturelles du Second Empire. Les Goncourt y retrouvent Gautier, Flaubert, Sainte-Beuve et bien d'autres! Les freres nous parlent beaucoup de la Princesse, de sa vie, de son temperament et de ses idees. Tenant sans doute de Bonaparte, avec un bon sens herite de la grand-mere Laetitia, elle ne se bercait pas d'illusions. Grande fut son influence sur les Goncourt.
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